Serbis

| Philippines |
En première suisse | Cannes 08, en compétition
de Brillante Mendoza



Depuis quatre ans, une nouvelle génération de jeunes réalisateurs, dite «digitale», ranime de façon étourdissante un cinéma philippin un brin assoupi depuis la mort de Lino Brocka en 1991. Réalisés en marge du système qui produit des films commerciaux diffusés sur les chaînes satellitaires destinées aux millions de travailleurs émigrés philippins, leurs longs-métrages réalisés en numérique participent d’une esthétique de la pénurie libératrice. Venu de la publicité, Brillante Mendoza a littéralement médusé les critiques à Cannes avec «Serbis» dont l’action est située dans un cinéma décrépit qui diffuse des vieilles bandes érotiques des années septante. Au bord de l’implosion, la famille Pineda exploite la salle et, surtout, gère tous les trafics sexuels qui s’y trament sous le couvert des projections. Ordonnatrice de ce chaos, la grand-mère fait mine de s’agacer de l’origine de ses revenus, mais elle se garde de mettre un terme à ce ghetto, car elle sait bien qu’il n’existe pas de salut financier aux Philippines, hors le sexe! En résulte un film à nul autre pareil, qui capte une vitalité désespérée dont le paradoxe nous hantera longtemps. Dans la vraie vie, le cinéma s’appelle aussi le «Family», espérons qu’aucun enfant n’y circule avec son tricycle… A voir absolument!
SERVICE, Philippines / France, 2008, couleur, 1h30, programme n°155