Le Jura est bien là

C’est un abîme qu’on appelle le Creux-du-Van. Les glaces, la neige et le vent ont sculpté ce cirque rocheux de 200 mètres de haut au cœur du massif du Jura. Face au précipice, un homme se tient seul, comme s’il voulait braver le vide gigantesque qui se tient devant lui. Grandiose, le décor naturel confère à cet instant une certaine émotion, c’est peu dire!

Cette fois, il ne s’agit pas d’une scène du film «Le vent tourne» de Bettina Oberli. Ce n’est pas non plus Pierre Richard dans «La Partie d’échecs» (1991) de Yves Hanchar, également tourné au même endroit. Non, on est ici avec Aurélien Recoing dans le rôle de Jean, personnage vaillant de «Tout un hiver sans feu» de Greg Zglinski, lauréat du Prix du cinéma suisse et sélectionné à la Mostra de Venise en 2004.

Les paysages du Jura vont décidément à ravir à nombre de cinéastes! Réalisé d’après un scénario écrit par Pierre-Pascal Rossi, producteur à la RTS et Neuchâtelois de cœur, «Tout un hiver sans feu» en est l’un des meilleurs exemples, puisqu’il nous fait voyager à travers tout le Jura, depuis La Brévine jusqu’à Delémont. De nombreuses scènes ont en effet été tournées dans la fameuse «Sibérie de la Suisse», par moins dix degrés. D’autres ont pour décors la fonderie Von Roll à Choindez, notamment la cantine de cette usine, fleuron de l’industrie de la sidérurgie helvétique, qui a définitivement éteint son haut-fourneau en 2008. Tout un symbole pour un film dont la trame se base sur un dramatique incendie…

A propos de «Tout un hiver sans feu»
Agriculteur, Jean (Aurélien Recoing) a perdu sa fille Marie dans l’incendie de son étable. Depuis le drame, la neige a recouvert les poutres calcinées du bâtiment. Sa femme Laure (Marie Matheron) s’est réfugiée dans un mutisme qui avoisine la folie. Jean se décide à la faire soigner dans un hôpital psychiatrique. Il vend ses dernières vaches et part travailler comme ouvrier dans une fonderie appartenant à un ami d’enfance.

Au milieu de cette fournaise quotidienne, il fait la connaissance de Labinota (Gabriela Muskała), une réfugiée kosovare qui a vécu, elle aussi, bien des drames. Flanquée de son frère Kastriot (Blerim Gjoci), celle-ci garde envers et contre tout le sens de la fête. En leur compagnie, Jean apprend peu à peu à accepter la peur et la douleur. Il retrouve lentement le goût de vivre, alors que s’annonce le dégel du printemps…

Tiré du premier scénario écrit par le regretté Pierre-Pascal Rossi, journaliste et producteur de l’émission «Passe-moi les jumelles», «Tout un hiver sans feu» saisit ses personnages juste après le drame, quand les mots manquent, alors que la parole serait essentielle. Dans les paysages très expressifs des montagnes neuchâteloises, le cinéaste suisse d’origine polonaise Greg Zglinski remplace les mots absents par les images, usant à merveille des décors glacés et des visages butés de ses acteurs, dont celui d’Aurélien Recoing qui restitue à la perfection la souffrance muette de Jean.

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