Vénus noire

Venise 2010, en compétition
de Abdellatif Kechiche |
avec Yahima Torres, André Jacobs, Olivier Gourmet, Elina Löwensohn, etc.

Saartjie Baartman a bel et bien existé! Née en 1789 en Afrique du Sud, elle accompagna son maître en Europe. Celui-ci comptait bien tirer profit de ses particularités physiques: un fessier surdéveloppé et des parties génitales étirées connues sous le nom de tablier «hottentot», selon le terme méprisant qui qualifiait les Bushmen et leurs clics de langue… Réalisé par Abdellatif Kechiche, «Vénus noire» commence à Paris en 1817, dans l’enceinte de l’Académie Royale de Médecine, où un anatomiste nommé Georges Cuvier conclut, preuve à l’appui devant un parterre de distingués collègues, à l’infériorité de la race noire. Sept ans plus tôt, Saartjie livrait son corps en pâture au public londonien des foires aux monstres et devenait la Vénus hottentote, l’icône des bas-fonds puis celle des bordels… Multipliant les situations d’exhibitions, des bouges de Londres aux salons bourgeois de Paris, l’auteur de «La Graine et le Mulet» (2007) fait de ces immondes événements passés une archive du présent en détaillant à chaque fois les réactions d’un public médusé. La Vénus noire, cette femme vendue et humiliée, fait écho à toutes les abominations de l’humanité et place le spectateur dans la situation du voyeur coupable de ce phénomène de foire, du «collabo». Sublime, cette reconstitution historique acquiert ainsi un fort parfum d’actualité, au vu du sort, économique et social, réservé aujourd’hui à nombre de minorités.
France / Italie / Belgique, 2010, couleur, 2h39, programme n°165