Under the Skin

A voir jeudi 17 août 2017 à 1h30 sur Arte |

Metteur en scène de théâtre, publicitaire et vidéaste, le Britannique Jonathan Glazer a tourné nombre de clips musicaux, notamment pour Massive Attack, Radiohead ou Jamiroquai, avant de tourner «Sexy Beast» (2000), un premier long-métrage décalé sur le mode du film de gangster. Après «Birth» (2004), un mélodrame déjanté où Nicole Kidman se retrouve face à un gamin jurant être la réincarnation de son mari décédé, il revient au cinéma avec «Under the Skin», un film fantastique avec Scarlett Johansson en tête d’affiche.

Adapté du roman de science-fiction homonyme de l’écrivain Michel Faber, «Under the Skin» (littéralement «sous la peau») débute par un prologue quasi surréaliste, où la lune et l’œil se succèdent et s’interpénètrent comme autant de visions vulvaires ou phalliques. Quasi expérimentale, la séquence symbolise la naissance d’un corps étrange, extraterrestre, que l’on retrouve ensuite incarné par Scarlett Johansson, en noiraude et en fourrure. Sillonnant les rues écossaises d’Edimbourg au volant de sa camionnette, suivie par un mystérieux motard, elle interpelle les passants solitaires, les invite à monter et leur fait des avances. Tournées en caméra cachée, ces scènes expriment à merveille l’attraction réelle du personnage et de l’actrice.

Après les avoir attirés chez elle, la très féminine extraterrestre les invite à se dévêtir, tandis que les décors disparaissent, jusqu’à ce que ne se détachent plus que les corps dans un noir absolu, une encre liquide et goudronneuse, où ils finissent par «se perdre»… Grâce à cette esthétique audacieuse d’une beauté sidérante, à laquelle participe une bande-son sonnante et stridente, Jonathan Glazer parvient à répéter le processus de prédation à l’identique avec de nombreuses proies faciles, sans jamais ennuyer le spectateur. Avec humour, il nous révèle alors un alien aspirant et digérant les hommes sans distinction, totalement étranger aux émotions humaines.

Ce faisant, Glazer n’explicite à aucun moment les motivations de son personnage, laissant au spectateur la liberté de doter le film de sa propre interprétation. En résulte une œuvre fascinante et étonnante, au-delà des conventions, qui joue avec les genres, de la science-fiction à l’horreur, pour aller vers quelque chose d’indescriptible, à la fois sensitif et métaphysique, et surtout très peu consensuel.

de Jonathan Glazer
Etats-Unis, 2014, 1h47