Timbuktu – Le Chagrin des oiseaux

Cannes 2014, en compétition |
de Abderrahmane Sissako |
avec Ibrahim Ahmed dit Pino, Toulou Kiki, Abel Jafri, etc.

    timbuktu_WEB

    Réalisateur de chefs-d’œuvre comme «La Vie sur terre», «En attendant le bonheur» et «Bamako», où il instruit le procès hélas fictif des institutions financières qui ruinent l’Afrique, le Mauritanien Abderrahmane Sissako confirme avec le bouleversant «Timbuktu» son statut de plus grand cinéaste africain existant. En prise directe avec l’actualité, son cinquième long-métrage est un film de résistance, tourné dans les paysages épurés du Mali, pays d’accueil où il a vécu enfant, en exil avec sa famille. En 2012, Tombouctou et ses environs tombent entre les mains des milices djihadistes. S’instaure alors un régime de terreur qui veut tétaniser la vie et détruire l’art. Avec les armes de son cinéma poétique à nul autre pareil, Sissako montre comment cette bande de bras cassés, aussi hétéroclite qu’inculte, tente de prendre en otage une population respectueuse des préceptes d’un Coran ouvert et pacifiste. Malgré les châtiments qu’ils encourent, hommes et femmes s’efforcent de tourner en dérision des diktats absurdes, comme obliger la poissonnière à porter des gants en laine, ou interdire le football et le chant, quand bien même ce dernier rend grâce à Allah… Evitant tout manichéisme, Sissako restitue cette tragicomédie, sans nous en épargner les violences. En résulte un film admirable et indispensable, dont maintes séquences resteront longtemps gravées dans la mémoire du spectateur, à l’exemple de ces enfants jouant au foot sans ballon, histoire de déjouer la surveillance et les brimades des djihadistes qui ne jurent pourtant que par Zidane!
    France / Mauritanie / Mali, 2014, couleur, 1h37, programme n°193