Tel Aviv on Fire

Haïfa 2018, Meilleur film
Venise 2018, en compétition

Réalisateur arabe israélien, Sameh Zoabi est né dans un village palestinien près de Nazareth. Résident de la Cinéfondation à Cannes et du Screenwriters Lab de Sundance, il appartient désormais aux cinéastes avec lesquels il faudra compter. Après le succès de «Téléphone arabe», une comédie inspirée de sa jeunesse qui raille les relations intercommunautaires en partant de l’installation d’une antenne par la compagnie israélienne des télécoms, il démontre, dans la lignée d’Elia Suleiman, sa verve comique et critique avec «Tel Aviv on Fire».

Salam (Kais Nashif), un Palestinien de Jérusalem, se rend chaque jour à Ramallah, sur le tournage d’un feuilleton à l’eau de rose situé dans les années 1960, à l’aube de la guerre des Six Jours. Chargé de corriger les erreurs de dialogues, il se voit promu au poste de scénariste grâce à Assi (Yaniv Biton, connu en Israël en tant qu’humoriste de stand-up), le commandant du checkpoint par lequel il transite. Alors que ce dernier saisit l’occasion d’épater son épouse fan de la série, Salam tente de reconquérir le cœur de l’amoureuse qui l’a éconduit…

Jouant avec la comédie romantique et le film dans le film pour décrire, avec la distance que confère l’humour, l’absurdité d’un conflit politique sans fin, «Tel Aviv on Fire» est une comédie pleine d’autodérision qui dynamite les clichés. Ancré dans la réalité du conflit israélo-palestinien, le film réussit le pari d’équilibriste de recourir aux mécanismes du comique d’exagération et à la fantaisie, tout en remuant le traumatisme de la Guerre des Six Jours.

Décrivant l’absurdité de cette guerre au sein même du soap opéra produit par l’oncle du héros, qui a lui-même combattu en 1967 et appartient à ceux qui ont nourri l’espoir d’une résolution grâce aux accords d’Oslo, Sameh Zoabi fusionne passé et présent pour montrer la rupture générationnelle qui semble aujourd’hui gagner ces deux pays. Tandis que les jeunes aspirent simplement à la liberté, les anciens se murent dans la propagande partisane. Certes, si le cinéaste veille, peut-être par prudence, à montrer l’impossibilité de faire valoir une vision sur l’autre, il n’en demeure pas moins l’impression qu’il s’amuse à railler les conservateurs de tout poil.

de Sameh Zoabi
Luxembourg / France / Israël / Belgique, 2018, 1h37