Un triptyque singulier

Né à Neuchâtel, Nathan Hofstetter s’est formé comme réalisateur à l’Ecole cantonale d’art de Lausanne. En 2012, il remporte à Locarno le concours national des Léopards de demain avec son film de diplôme, «Radio-actif», où il révèle face-caméra sa différence à travers un autoportrait réalisé lors d’une crise aiguë de sa maladie. Diagnostiquée l’année suivante, celle-ci confère à sa filmographie une tournure singulière. Ainsi, en 2013, Nathan Hofstetter porte son regard sur un ami souffrant, comme lui, de schizophrénie paranoïde dans son deuxième court-métrage, «Lui, Hitler et moi».

En 2019, le réalisateur neuchâtelois complète et approfondit son propos par le biais d’un premier long-métrage documentaire où il persiste à se raconter, mais donne aussi la parole à ses proches et compagnons d’infortune psychiatrique, ses «loulous» comme il se plaît à les appeler. Fidèle au même dispositif filmique des deux précédents volets, Nathan Hofstetter peint un tableau intimiste de ses ami·es et de sa famille au moyen d’images tournées entre 2011 et 2018. Il s’en tient à une manière de filmer simple, qui lui permet de capturer des instants à la fois authentiques et très forts: «Pendant huit ans, j’ai filmé quand je sentais une énergie naître en moi ou chez l’autre. Les moments que je capte sont intimement liés à la force de l’instant, que ce soit avec une personne, un événement ou la simple présence de la beauté. Le fruit de ces échanges est devenu ce film, qui parle non seulement de la maladie, mais aussi de la notion d’amour…».

A propos du film

«Loulou» constitue le dernier volet d’une trilogie sur le milieu psychiatrique dont Nathan Hofstetter fait partie. Vulnérable, mais animé par la certitude que le film qu’il est en train de tourner procède d’un processus mystérieux dont lui et ses camarades sortiront peut-être plus forts, le réalisateur en tire un véritable poème visuel, brut et délié de toute attache avec la norme cinématographique. Dans l’Antiquité, l’on disait des fous qu’ils étaient les explorateurs malchanceux de l’invisible. Ce don de voyance malheureuse leur valait le plus grand respect des gens soi-disant normaux. A sa façon, «Loulou» procède du même mouvement de reconnaissance ou, à tout le moins, d’empathie.

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