Mundo grúa

de Pablo Trapero |
avec Luis Margani, Adriana Aizemberg, Daniel Valenzuela, etc.


En regard de la crise gravissime qui frappe actuellement l’Argentine, le premier long-métrage du jeune Pablo Trapero (plusieurs fois primé au Festival de Fribourg 1999) prend une dimension “rétroactivement” prémonitoire. Tourné en noir et blanc, avec très peu de moyens, “Mundo Grua” s’attache aux pas très attachants de Rulo, quinquagénaire à bedaine un brin désabusé, qui ressasse dans son coin les “grandes” heures de sa petite carrière de musicien de quartier. Sans travail depuis belle lurette, le brave Rulo s’est mis dans la tête de devenir grutier… Après bien des déboires, il finira par (assez mal) conduire des bulldozers dans un coin perdu du pays, non sans craindre que son fils ne l’imite dans sa trajectoire de perdant sympathique. Trapero confie avoir vu et revu “Les temps modernes” (1936) avant de passer à l’acte! Il est vrai que son film donne souvent l’impression d’être une “réactualisation” très stimulante du chef-d’œuvre de Charlie Chaplin — Rulo se débrouille aux commandes d’une grue aussi bien que Charlot à la chaîne! Au final, le spectateur se retrouve confronté avec une œuvre d’une puissance subversive insoupçonnée, qui raille finement les soi-disant valeurs du discours néo-libéral, à un point tel qu’elle pourrait avoir comme sous-titre “drame comique de la flexibilité”!
MUNDO GRUA, 1999, Argentine, noir et blanc, 1h30, programme n°103

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