Love, Simon

Producteur et scénariste prolifique, Greg Berlanti a fait des adolescents son public favori en tournant nombre de séries à succès, à commencer par «Dawson’s Creek» et «Everwood». Ouvertement gay, le cinéaste américain y a abordé, à plusieurs reprises, le thème de l’homosexualité en alliant humour et sensibilité. Avec «Love, Simon», adaptation d’un roman pour ados signé Becky Albertalli, il livre aujourd’hui une comédie romantique sur le coming-out, la tolérance vis-à-vis des homosexuels à l’école et la protection de la sphère privée à l’heure des réseaux sociaux.

Lycéen modèle, Simon habite une banlieue middle class aisée américaine. Entouré de parents formidables et d’une petite sœur sympathique qui rêve de devenir cheffe de cuisine, il prend chaque matin sa voiture pour aller chercher ses grandes amies Leah et Abby, sans oublier Nick, secrètement amoureux d’Abby. La bande d’ados se rend ainsi chaque matin au collège pour une nouvelle journée pleine de petits bonheurs. Mais Simon garde un lourd secret: il est homosexuel et personne ne le sait (à part lui). Un jour, sous couvert du pseudonyme Blue, un collégien déclare être gay sur le réseau social de l’école. Tandis qu’il commence à correspondre avec ce dernier, Simon se voit contraint de sortir du placard…

Avec le concours de jeunes actrices et acteurs formidables, Greg Berlanti réussit à capter tous les contours du sujet: le cinéaste a en effet l’intelligence de montrer avec acuité, non seulement l’absurdité de la norme et celle de vouloir y rester, mais surtout les difficultés actuelles des jeunes à protéger leur vie privée et à relever le défi des réseaux sociaux, alors que leurs parents n’ont pas le recul nécessaire pour les prévenir des dérives du numérique. Cerner ainsi les enjeux identitaires tout en conférant au film cet indispensable équilibre entre feel-good movie et gravité, voilà tout le talent de Berlanti. Car, au-delà des scènes comiques affleurant les clichés mais tellement amusantes, l’homosexualité de Simon, habilement restituée en voix-off via sa correspondance avec Blue, demeure compliquée à vivre. Les petites phrases assassines de l’entourage sont en ce sens aussi bien amenées.

Certes, on est loin des électrochocs du cinéma militant LGBT, seul capable de contrer les représentations partielles ou caricaturales du mainstream. Mais c’est oublier que «Love, Simon» est destiné à un très large public. Son succès au box-office américain semble d’ailleurs démontrer toute la pertinence de cet alliage de sensibilité et d’humour, à l’image de cette question maligne posée par Simon: pourquoi ne devrait-on faire son coming-out que pour annoncer son homosexualité? Et non pas l’inverse: annoncer son hétérosexualité… Bref, une histoire gay qui reprend les codes de la romance hétéro, il fallait y penser!

de Greg Berlanti
Etats-Unis, 2018, 1h49