L’Arbre

A voir jeudi 04 août 2016 à 00h45 sur RTS Un |

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Julie Bertuccelli n’est de loin pas une inconnue. En 2003, cette réalisatrice française formée à l’école du documentaire avait remporté le César du meilleur premier film avec «Depuis qu’Otar est parti» où l’on voyait trois femmes de Tbilissi vivre dans le mensonge après le décès accidentel du fils adoré, parti faire fortune à Paris. En creux, la cinéaste rendait un hommage mélancolique et inspiré au prodigieux cinéaste géorgien Otar Iosseliani, lui aussi exilé à Paris (mais encore bien vivant et en activité).

Adapté du roman «L’arbre du père» de Judy Pascoe, rebaptisé «The Tree», son nouveau film situe son action en Australie. Avec leur quatre enfants, Dawn (Charlotte Gainsbourg) et Peter (Aden Young) coulent des jours très heureux dans leur maison accolée à un grand figuier. Déménageur de son métier, ce père de famille aimant sillonne les routes australiennes en transbahutant dans un camion des «home sweet home» préfabriquées. Au retour d’un déménagement, Peter décède subitement. Non sans maladresse, Dawn essaye peu à peu de se remettre de cette disparition brutale. Elle finit par lâcher prise, retrouve un travail, peut-être un compagnon. Mais, pour Simone (Morgana Davies), le travail de deuil se révèle autrement ardu. A huit ans, des quatre enfants, elle est sans doute celle qui souffre le plus de l’absence définitive de son père.

En réaction, la petite commence à entretenir avec le figuier une relation très particulière. Elle dit y entendre la voix de son père qui lui parle régulièrement. Bientôt toute la famille se perche dans ses branches. Même s’il se montre incrédule, le garçon commence à régulièrement arroser l’arbre (ce qui est rigoureusement interdit en Australie). Surprise, le végétal se met à croître de façon impressionnante, au point de menacer dangereusement l’espace privé si difficilement reconquis par Dawn. Celle-ci comprendra le message… N’en disons pas plus, sinon que la nature saura récompenser son geste altruiste!

Fidèle au roman d’origine, Julie Bertuccelli ne fait aucun distinguo entre réel et imaginaire, chacun entrant à sa manière dans le «jeu de l’arbre», tendant à prouver que tout travail de deuil est un exercice de folie douce, plus ou moins raisonné, comme l’ont souvent fait remarquer les psychologues. Cette belle réussite tient à la manière dont la réalisatrice parvient à faire de la nature un véritable personnage, promouvant cette forme d’animisme intime par laquelle ceux qui restent peuvent survivre et se reconstruire. Sans oublier Charlotte Gainsbourg dont la fragilité intrinsèque sied à merveille au rôle!

The Tree
de Julie Bertuccelli
France / Italie / Australie, 2010, 1h40