La Vie moderne

Prix Louis Delluc 2008 | Cannes 2008, Un Certain Regard
de Raymond Depardon |

Après «L’Approche» et «Le Quotidien», qui formaient le diptyque «Profils paysans», Raymond Depardon revisite les paysans de moyenne montagne. Il livre ainsi un film révolutionnaire (au sens cinématographique du terme), qui signe l’aboutissement de quinze années d’engagement sur le sujet. Sans jamais tomber dans la carte postale ni ramener les paysans à la précarité dans laquelle ils vivent, Depardon ancre «La Vie moderne» dans le présent et raconte l’histoire de ces gens qui ne peuvent compter que sur eux-mêmes. Ce documentaire à nul autre pareil frappe alors par le naturel et la puissance avec lesquels il décrit les rapports humains… Assis sur son fourgon avec sa caméra 35 mm à 2 perforations, Raymond Depardon parcourt les routes qui vont jusqu’aux fermes et ses travellings l’amènent à filmer des instants décisifs: quand Marcel Privat rentre ses cinquante brebis, quand Paul Argot ouvre sa barrière dans le froid de l’hiver, ou encore quand Raymond Privat s’accroche à sa colline sous une lumière quasi sacrée. Plus besoin de plan de coupe ni de champ contrechamp, le format scope permet de cadrer large et en profondeur, aussi bien à l’extérieur que dans les cuisines des fermiers. Et c’est aussi valable pour le son: Claudine Nougaret (épouse et productrice de Depardon) le spatialise au moment même de sa prise. L’un est maître de l’image, l’autre du son, ce ne sont pas de simples témoins du réel, mais de véritables auteurs, puisqu’ils imposent leur point de vue à chaque instant du tournage. C’est l’essence même du cinéma direct, celui où images et sons sont en parfaite synchronisation… comme au théâtre!
France, 2008, couleur, 1h30, programme n°153