«Dix grands classiques du cinéma français»

    Caméra-stylo, programme n°46 |

    CameraStylo_46_WEB

    Sans esprit partisan, Passion Cinéma a voulu rendre hommage au cinéma français qui, en Europe, reste le seul à tenir un peu tête à l’«envahisseur» américain. La France compte actuellement quelque 4500 écrans et 980.000 fauteuils; dans la Communauté des quinze (et au-delà), c’est le pays qui résiste le mieux à la crise touchant l’ensemble de la création et de la diffusion cinématographique.

    Si le cinéma français se porte moins mal que d’autres, c’est sans doute parce que le «cinoche» est depuis un siècle profondément enraciné dans la culture française (entre autres causes). La petite anthologie montée par Passion Cinéma et intitulée Dix grands classiques du cinéma français souhaite en faire la preuve.

    Qui dit «grand classique» ne veut pas forcément énoncer «film classique». Une grande partie des œuvres présentées dans ce cycle, à leur sortie, ont constitué des ruptures radicales, des manifestes audacieux qui ont été à même de changer la face du Septième Art. Songeons au scandale que suscita la sortie du sublime La règle du jeu (1939) de Jean Renoir, à son utilisation révolutionnaire de la profondeur de champ. De même, à son époque, le «réalisme poétique» de Marcel Carné — que l’on présente aujourd’hui comme la quintessence du classicisme à la française — avait complètement transcendé un cinéma français englué dans son apprentissage du Parlant.

    Même constatation pour le grand Jacques Tati: à considérer ses films comme des «classiques», nous perdons de vue que ce cinéaste d’exception avait jeté avec Jour de fête (1949) les fondements d’un ciné-art comique inédit, aussi sonore que visuel, dont aujourd’hui encore nous avons pas encore saisi toute la portée. Hiroshima mon amour (1959) créé par Alain Resnais et Marguerite Duras reste et restera encore longtemps une porte ouverte sur l’avenir du cinéma. Idem encore pour Jacques Demy, dont Les parapluies de Cherbourg (1964) a infligé un tel traitement de choc au genre de la comédie musicale que l’«industrie» ne s’est guère empressée de l’encourager à poursuivre.

    Vincent Adatte